Ce projet de thèse a des fondations « anciennes ». Et pour le comprendre, il faut revenir à l’année du mémoire de Master 1.
2012, La Légende Final Fantasy VII est sorti chez les éditions Pix’n’love. Comme chaque fan, je me mets à dévorer les pages du livre. Dirigé par Nicolas Courcier et Mehdi El Kanafi ce livre assez volumineux propose d’explorer différentes parties du jeu : résumé, making of, réflexions sur diverses thématiques, analyses de personnages etc… J’étais cependant très surpris de la part accordée à la musique : une dizaine de pages alors que le bouquin dans son entièreté en fait environ trois cent. Merde. La musique de Nobuo aurait-elle si peu d’importance? Peu importe, curieux de savoir ce que l’on peut dire en dix pages, je me plonge dans la lecture de la partie sobrement nommée « Musiques ». Et là, le constat est affligeant : du journalisme. Si l’on peut résumer les pages écrites, on en retiendra que One-Winged Angel est un morceau super et que le thème d’Aerith fait pleurer. Je caricature bien sûr, mais faute est d’avouer que cette partie « Musiques » ne nous apprend pas grand chose, voire rien. C’était l’élément déclencheur de tout mon projet. Je savais déjà plus ou moins vers quel compositeur j’allais faire mon mémoire, mais là j’en suis certain : je ferai mon mémoire sur Nobuo Uematsu, et je commencerai par rédiger secrètement l’entièreté de cette partie « Musiques ». C’était ça mon projet : écrire ce que personne n’avait encore écrit, faire ce que personne n’a encore fait : analyser Nobuo Uematsu. Mais qui dit Mémoire dit problématique. Quelle problématique peut-on bien trouver pour justifier l’analyse de Final Fantasy VII ? J’ai de suite décidé de chercher des pistes d’approche dans le bouquin. On y parle personnage, et plus particulièrement de leur construction au fil du scénario. Le fil est trouvé, je vais justifier le comportement de tel ou tel personnage par la musique. Pourquoi Cloud doute-t-il de son identité ? Pourquoi Barret est-il si vulgaire et Cid si nerveux ? La machine est lancée et je décide de répondre à ces questions au fil de mon Mémoire sobrement intitulé « Final Fantasy VII : de l’empathie à la cohérence d’un univers ».
Encouragé par mon Directeur de Recherche, enthousiaste à son tour à l’idée qu’un élève décide d’analyser un nouveau média tel que le jeu vidéo, je me mets à la recherche des Leitmotiv du jeu. Pour simplifier les choses, j’ai décidé dans le mémoire d’utiliser le terme leitmotiv pour illustrer un thème musical qui accompagne un personnage. J’oppose cette définition au leitmotiv Wagnérien qui est bien plus profond que cela. Le jeu simplifie cette recherche car les motifs rattachés à des personnages sont facilement identifiables par leur nom sur les disques : Barret’s Theme ou encore Cid’s Theme. Un seul manque à l’appel, celui de Cloud. Après quelques recherches et conseils d’amis proches, le morceau Main Theme – Final Fantasy VII se propose comme le thème de Cloud.
Aussitôt, j’ai commencé à analyser les morceaux. Mais un problème est apparu : il me fallait avoir un détail du scénario, et du schéma déclencheur des musiques. Je m’explique : quand savoir quelle musique est utilisée dans le jeu en entier ? Peut-être l’utilisation de musiques particulières à des moments particuliers permettrait d’en comprendre plus ? Il me fallait une méthode. J’ai longuement réfléchi, et celle qui me semblait la plus appropriée était de faire un tableau récapitulatif. Ainsi, tout au long du jeu, j’ai rempli un tableau avec comme colonnes :
– Le nom du morceau et son numéro de Piste et de CD (pour s’y retrouver plus facilement) lorsqu’il est entendu
– Le lieu où le morceau est joué
– La situation scénaristique qui l’accompagne
– Les personnages présents
– Une case de commentaire me permettant de me rapporter à d’autres morceaux aux thèmes musicaux similaires.
Grâce à cela, j’en conclu qu’il y a 203 changements de musique tout au long du jeu et uniquement si l’on suit la trame scénaristique. On ne passera donc pas par Wutai, et l’on n’ira pas chercher Vincent.
Je tiens tout de même à préciser que les différents itérations du Main Theme sur la Mappemonde ne sont pas répertoriées. J’entends par là qu’à chaque fois que l’on doit passer sur la Mappemonde et que l’on entend le Main Theme, je ne l’ai pas noté. Cela n’a aucun sens. Il en est de même pour les musiques de combat. On a donc 203 changements de musiques purs.
Ce type d’analyse sera gardée pour les analyses suivantes lors de la thèse.
Grâce à ce genre de tableau, j’ai pu me construire une « carte des musiques » de Final Fantasy VII, il ne me restait plus qu’à analyser tout ça, et construire mon mémoire. Le résultat est bien reçu, mais manque de profondeur et de rigueur. Les articles partagés sur ce site en sont tirés sans changements. C’était mon premier essai en musicologie, et j’en étais fier.
Durant la seconde année de Master, j’ai décidé de continuer mon mémoire et l’étoffant un peu et en y ajoutant Final Fantasy VIII. Le jeu est différent à analyser de par sa construction musicale, mais grâce au tableau précédemment introduit, l’analyse se fit sans encombre. Gage de maturité en écriture et en analyse, le mémoire de Master 2 a été très agréablement bien reçu. Mon DR et le jury m’ont quelque peu « poussé » à aller en Doctorat pour, je cite « Ne pas laisser l’analyse au simple mémoire, ce serait du gâchis ». Etant donné que me prêter au jeu de l’analyse musicale commençait doucement à me plaire, j’avais déjà eu en tête de continuer en Doctorat. Mais avec les encouragements du jury en plus, ma décision était prise : j’irais en Doctorat, et j’analyserai toutes les musiques des Final Fantasy I à X. J’analyserai Nobuo Uematsu, et je ferai alors ce que personne n’avait encore été capable de faire : réunir toutes ces analyses dans un essai unique.